Nora ANSELL-SALLES

mercredi 7 novembre 2012

QUELLE PLACE POUR LA COLOSCOPIE VIRTUELLE ?


 Interview d’un expert

Pr Frank Pilleul, radiologue digestif et oncologie interventionnelle

Centre Anti-Cancéreux Léon Bérard – Lyon

 


Comment se déroule une coloscopie virtuelle ?

La coloscopie virtuelle est un scanner dédié à l’exploration du colon réalisé en consultation externe précédé d’une préparation digestive variable selon les centres mais qui comporte habituellement un régime sans résidu sur 24H, un marquage des selles par absorption d’un produit de contraste et une évacuation colique. Ce scanner est pratiqué avec une faible dose de rayons X et par une équipe formée et entraînée. Le colon est lentement distendu par l’insufflation de CO² via une petite sonde rectale. L’utilisation d’un insufflateur automatique qui contrôle la pression rend l’examen plus confortable et le risque de perforation est ainsi pratiquement nul. La reconstruction 3D de la lumière colique permet une navigation virtuelle interactive dans le colon distendu. Des outils de détection assistée facilitent la recherche des petits polypes. La sensibilité de la coloscopie virtuelle est de 98 % pour la détection des cancers et de plus de 90% pour celle des polypes de 10 mm ou plus.

Quelles sont les principales différences avec la coloscopie « classique » ?

En comparaison, la coloscopie, nécessite le plus souvent une anesthésie générale. Elle permet dans le même temps la détection et la résection des lésions significatives mais elle est incomplète dans 3% des cas et peut manquer des lésions en raison de leur situation derrière un angle ou un pli. Ses complications sont essentiellement les risques de perforation évalués à 1 cas pour 1000.

 
Quelles sont les indications précises de la coloscopie virtuelle ?

L’HAS, en lien avec les différentes sociétés savantes a clairement précisé en 2010 la place de la coloscopie virtuelle.

 

Indications de la coloscopie virtuelle recommandées par l’HAS

·        En complément d’une coloscopie de dépistage incomplète.

·        En remplacement de la coloscopie chez un patient fragile, à risque anesthésique ou hémorragique.

·        Pour tout patient à risque élevé ou avec un test Hemoccult® positif et qui refuse la coloscopie.

 

Enfin, à côté de ces indications, en cas de dépistage individuel, il est important de considérer que la meilleure performance pour un risque minimal est obtenue par le scanner avec coloscopie virtuelle.

Le lavement baryté n’est plus indiqué dans ce contexte.

 Pouvez-vous nous faire un bref rappel sur le cancer colorectal ?

Le cancer colorectal est la cause d’environ 17 500 décès par an alors qu’il survient le plus souvent à la suite d’une lente dégénérescence, sur plusieurs années, d’adénomes coliques dépassant le centimètre, facilement repérables par les techniques morphologiques et alors opérables.

 
Le dépistage des lésions cancéreuses ou précancéreuses dépend du niveau de risque :

 

*      En cas de risque élevé, en particulier génétique lorsque qu’il existe un antécédent familial de cancer colorectal avant 65 ans, le dépistage est basé sur la réalisation d’une coloscopie régulière avec résection des polypes.

*      En cas de risque moyen, le dépistage dans la population est basé sur la recherche de saignement occulte dans les selles par l’Hemoccult®. Cette technique doit être répétée tous les 2 ans entre 50 et 74 ans. Dans le cadre des campagnes européennes de dépistage en population, la sensibilité des programmes de dépistage par Hemoccult® tous les 2 ans pour le diagnostic de cancer colorectal est estimée autour de 50 %. Le taux de participation à ces campagnes est de 50 à 60 %. On peut donc estimer la sensibilité de ces programmes de dépistage pour le diagnostic de cancer colorectal en population entre 22 et 33 %.Tout Hemoccult® positif doit conduire à la réalisation d’une coloscopie.

 


Références

Pickhardt PJ, Hassan C, Halligan S, Marmo R. Colorectal Cancer: CT Colonography and Colonoscopy for Detection—Systematic Review and Meta-Analysis. Radiology May 2011 259:393-405.

Ridereau-Zins C, Pilleul F, Gandon Y, Laurent V; la Société d’imagerie abdominale et digestive (SIAD) : CT colonography : Why ? When ? How ? Diagn Interv Imaging. 2012 Jan;93(1):2-9. Epub 2011 Nov 30.

Haute Autorité de Santé ; Janvier 2010. Coloscopie virtuelle. Méta-analyse des performances diagnostiques, indications et conditions de réalisation.

Le Guide du bon usage des examens d’imagerie : http://www.sfrnet.org/sfr/societe/2-publications/publications-sfr/01-Guides2009/index.phtml ; il sera mis à jour à l’automne.

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