Nora ANSELL-SALLES

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mardi 18 février 2014

RCA : les efforts internationaux déployés n'arrêtent pas les massacres





Les efforts internationaux déployés pour protéger

les Centrafricains ne suffisent pas à arrêter les massacres




Le Conseil de Sécurité des Nations Unies et les Etats africains doivent agir immédiatement
afin de faire cesser la violence et permettre un déploiement plus important de l’aide humanitaire.

Images HD Libres de droit disponibles
(Contact : 01.40.21.28.40. / François Dumaine)



Genève, le 18 février 2014 – En République centrafricaine (RCA), l’extrême violence à l’encontre des civils et les assassinats ciblés de groupes minoritaires illustrent l’échec des efforts internationaux déployés pour protéger la population, déclare l'organisation humanitaire médicale internationale Médecins Sans Frontières (MSF). Pour l’organisation, l’insuffisance de la réponse internationale actuelle est la preuve accablante de l’abandon pur et simple de la population centrafricaine.


MSF appelle les Etats membres du Conseil de sécurité de l'ONU, ainsi que les pays donateurs, à se mobiliser pour mettre immédiatement un terme aux atrocités commises à l’encontre des populations ; à œuvrer à la mise en place d’un niveau de sécurité suffisant pour que les populations puissent se déplacer, sans craindre pour leur vie ; et permettre un déploiement massif de l'aide afin de répondre aux besoins essentiels de la population. Les dirigeants locaux et nationaux doivent faire tout leur possible pour stopper la violence et renforcer la protection.


« Notre principale préoccupation concerne la protection. Alors que nous prenons en charge des milliers de blessés, nous nous sentons impuissants face à cette violence extrême. Nous voyons des centaines de milliers de personnes fuir leurs maisons, c’est en fait la seule issue qui leur reste pour ne pas être tuées », déclare le Dr Joanne Liu, Présidente Internationale de MSF, de retour de RCA. « Le manque d’engagement et de mobilisation des dirigeants politiques du Conseil de Sécurité des Nations Unies est choquant. La mobilisation trop limitée de pays africains et de l'Union Africaine, insuffisante pour lutter contre la violence, est entrain de déchirer littéralement la RCA. »


Les civils centrafricains, issus des deux principales communautés religieuses du pays, sont otages de la violence perpétrée par les groupes armés, premiers responsables de ces atrocités. Depuis le 5 décembre, les équipes MSF ont pris en charge plus de 3 600 personnes souffrant de blessures par balle, grenade, machette, couteau et autres traumatismes violents à Bangui, la capitale et dans tout le pays.


« Quand j’étais à Bozoum, nous avons trouvé 17 blessés par armes à feu, machettes, et grenade qui étaient cachés dans une petite cour » témoigne le Dr Liu. « Ils n’osaient pas se rendre à l’hôpital, de peur d’être victimes de nouvelles attaques.. Leurs blessures étaient graves, certains perdaient du sang mais ils étaient tous là, assis, silencieux, sans plus aucun espoir.».


Les équipes MSF doivent faire face à de violentes attaques qui ont lieu à proximité ou à l'intérieur même des structures de santé. Le 12 février, dans la ville de Berberati, des hommes armés de machettes et de fusils se sont introduits au sein de l'hôpital, où MSF travaille, en tirant des coups de feu et mettant les patients en danger. Craignant pour leur vie, deux patients ont alors fui l'hôpital. A d'innombrables reprises et dans diverses localités, des dirigeants locaux, des dignitaires religieux et du personnel médical MSF ont dû s’interposer alors même que des hommes armés attaquaient ou menaçaient de tuer des individus, y compris des patients. Ces derniers refusent même régulièrement d’être transportés dans des ambulances par peur d’être victimes de nouvelles violences. De plus, l'insécurité générale a rendu certains axes routiers trop dangereux et donc impraticables.


Dans les 8 localités où MSF travaille, environ 15 000 civils regroupés se retrouvent piégés dans les enceintes d’hôpitaux, d’églises et de mosquées, vivant dans la peur d'être tués par des groupes armés. Dans des villes comme Bouar, 6 000 musulmans sont ainsi prisonniers, menacés d'être tués s'ils tentent de quitter la ville. MSF a ouvert des postes de santé dans plusieurs de ces enclaves, y compris à Bangui, où les blessés et les malades n’osent pas se rendre à l’hôpital, même s’ils n’ont que quelques centaines de mètres à parcourir pour s’y rendre.


Au cours des deux dernières semaines, à Bangui, Baoro, Berbérati, Bocaranga, Bossangoa, Bouca, Bozoum et Carnot, les équipes MSF ont vu des dizaines de milliers de personnes - issues de la communauté musulmane - fuir ou être transportées par camion vers les pays voisins, escortées par des forces armées internationales dans l’incapacité de les protéger par ailleurs. D'autres ont été évacuées du nord-ouest du pays vers Bangui et sont désormais prises au piège dans des camps qui sont devenus des enclaves et où elles continuent à vivre dans la terreur. La peur des persécutions a poussé des dizaines de milliers de civils, issus de toutes les communautés, à fuir dans la brousse, où ils n’ont accès à aucune forme de protection ou d'assistance humanitaire.


Les conséquences dévastatrices de la violence ont encore été aggravées par l'absence d’un déploiement assez significatif de l'aide humanitaire pour pouvoir répondre aux besoins les plus essentiels de la population. L’assistance, jusqu’ici consternante à Bangui a pratiquement été inexistante en dehors de la capitale. La distribution d’eau, de nourriture et d’abris manquent cruellement. Par exemple, la dernière distribution de nourriture dans le camp de Don Bosco, à Bangui, où plus de 20 000 déplacés sont regroupés, a eu lieu le 2 janvier dernier. Elle était destinée à couvrir deux semaines de besoins seulement. Un des exemples les plus marquants de l’insuffisance de l’aide est le camp de Mpoko, situé à l'aéroport international de Bangui, où environ 60 000 déplacés vivent dans des conditions catastrophiques et ce, à quelques centaines de mètres seulement de la piste de l'aéroport.


« Les horribles conditions de vie dans le camp de Mpoko soulèvent la question de savoir si la lenteur de la distribution de l'aide est une forme de négligence délibérée visant à dissuader les gens de venir s’installer ici », s’interroge le Dr Liu. «Compte tenu du niveau de violence à Bangui, les populations devraient être en mesure de choisir entre rentrer chez elles ou rester là où elles se sentent protégées. L’assistance devrait être fournie partout où elles se sentent le plus en sécurité ».


Même si des incidents de sécurité entravent quotidiennement les secours, l’important déploiement de personnel MSF (plus de 2 240 travailleurs, internationaux et nationaux) et d’activités (dans 16 villes à travers le pays) montre qu'il est possible de fournir une assistance humanitaire en RCA aujourd’hui.


« La crise humanitaire à laquelle nous assistons aujourd'hui est sans précédent en RCA, un pays négligé par la communauté internationale depuis des années » déclare le Dr Liu. « Nous lançons un appel aux Etats membres de l'ONU ; ces derniers doivent arrêter les demi-mesures. Une mobilisation totale doit avoir lieu maintenant, pas dans un ou six mois. Tous les jours, nous sommes témoins d’atrocités. Une catastrophe majeure est en train de se dérouler sous le regard indifférent des dirigeants internationaux. Ne pas répondre équivaut à faire le choix, conscient et délibéré, d'abandonner le peuple centrafricain ».


***



Suite aux actes d’extrême violence commis par les forces de l’ex-Séléka - et en guise de représailles - des milices locales d'autodéfense appelées « anti-Balaka » ont lancé des attaques collectives contre les civils musulmans, considérés comme le support politique potentiel des ex-Séléka. C’est ainsi qu’ a commencé la spirale de violences et de pillages qui, si elle a particulièrement ciblé les communautés musulmanes ces dernières semaines, continuent de concerner les communautés chrétiennes.


MSF travaille en République centrafricaine depuis 1999. Actuellement MSF gère 8 projets réguliers à Batangafo, Boguila, Carnot, Kabo, Ndélé, Paoua, Bria et Zémio ; et 8 projets d'urgence à Bangui, Bouar, Bangassou, Bozoum, Bossangoa, Bria, Yaloke et Berberati. MSF compte plus de 240 travailleurs internationaux et 2 000 collaborateurs locaux dans le pays. Au Cameroun, au Tchad, en République démocratique du Congo et au Congo-Brazzaville, d'autres équipes MSF viennent en aide aux réfugiés centrafricains.

mardi 26 novembre 2013

République Centrafricaine (RCA) : De récents affrontements conduisent à de nouveaux déplacements de population à Bouca.




MSF- qui travaille dans cette zone - renouvelle son appel à la communauté internationale, et notamment aux agences des Nations Unies, pour un déploiement plus important de l’assistance humanitaire et ce afin de répondre aux besoins générés par la crise actuelle en RCA.

 

Paris, le 26 novembre 2013, Suite à de nouveaux affrontements, la semaine dernière, entre des éléments anti-Balaka (groupes d’auto défense armés) et des forces de l'ex-Séléka, une nouvelle vague de déplacements de populations (la deuxième en moins de deux mois) a eu lieu à Bouca, dans le nord de la République centrafricaine (RCA). Pour Médecins Sans Frontières (MSF), ces évènements soulignent, à nouveau, la nécessité de déployer une action humanitaire d'urgence en RCA.

 

“Les combats de Bouca sont révélateurs de la façon dont la violence touche l’ensemble de la RCA”, déclare Sylvain Groulx, chef de mission MSF. “Nous sommes extrêmement préoccupés par les conditions de vie des populations déplacées, celles regroupées sur des sites surpeuplés, menacées par les épidémies, mais aussi celles qui sont « invisibles », cachées dans la brousse sans accès aux soins, à la nourriture ou à l'eau potable. Beaucoup reste à faire et doit être fait maintenant !"

 

Les affrontements de la semaine dernière à Bouca, ville qui compte 15 000 habitants, ont fait plusieurs morts et blessés dont certains ont été pris en charge par MSF. Deux patients dans un état critique ont dû être transférés vers l’hôpital de Batangafo, à 100 km de là. L’un d’entre eux est décédé en route.

 

Cette récente vague de violences fait suite à aux affrontements meurtriers de septembre dernier où environ 100 personnes ont été tuées lors d’attaques menées par des groupes armés à l’encontre de civils (catholiques et musulmans). 700 maisons avaient alors été brûlées et des milliers de personnes avaient été déplacées. Depuis, les populations vivent dans la peur et l'intimidation. Ainsi, un ultimatum ordonnant aux 700 déplacés de quitter l’enceinte de la mission catholique de la ville où elles avaient trouvé refuge leur a été donné mardi dernier. « A la suite de ces menaces, plus de la moitié des déplacés de la mission catholique ont fui » explique Matthieu Amiraux, coordinateur de projet MSF à Bouca. « La situation est très tendue. Les familles musulmanes ont-elles aussi quitté la ville. Les personnes que nous croisons désormais dans les rues sont des hommes armés ».

 

MSF tient également à rappeler que dans la ville voisine de Bossangoa, où d’importantes violences ont eu lieu en septembre dernier et où 35 000 personnes déplacées ont besoin d’aide, la situation ne s’est guère améliorée depuis. Mi-novembre, MSF avait mis en place des dispensaires mobiles pour pouvoir accéder à ceux qui se cachent en brousse, là où nos équipes constatent les conséquences de cette violence, ainsi que l’absence générale de réponse humanitaire.

 

Les personnes déplacées de Bouca ou de Bossangoa se rajoutent aux 400 000 personnes (soit 10% de la population) déjà déplacées dans le pays depuis le coup d'Etat de mars dernier.

MSF appelle les Nations Unies et d’autres organisations humanitaires à accroître leur présence afin de répondre aux besoins générés par cette crise. Alors que nous avons dû nous mêmes, à plusieurs reprises, évacuer temporairement nos équipes de différentes localités du pays, nos activités n’ont jamais été interrompues. Depuis décembre 2012, MSF a même accru son volume opérationnel et initié des projets d’urgence.

 

MSF travaille en RCA depuis 1997. Actuellement nous menons 7 projets « réguliers » à Batangafo, Boguila, Carnot, Kabo, Ndélé, Paoua et Zemio et a initié - depuis mars dernier - des activités d'urgence à Bossangoa, Bouca et Bria. Une équipe d'urgence mobile se tient prête à déployer une assistance dans les zones touchées par les pics de violence comme cela a été le cas à Bouar, Mbaiki et Yaloké.

 

Contact presse :

Charlotte Nouette-Delorme presse-msf@paris.msf.org