Nora ANSELL-SALLES

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lundi 2 février 2015

C'est à lire : la Newsletter de Gérad Bieth

LU POUR VOUS SUR :


Newsletter réalisée par Gérard Bieth - © www.annuaire-secu.com - Le portail indépendant des agents de la Sécurité sociale Vos commentaires ou suggestions sont les bienvenus, contactez-le(gerard AT annuaire-secu.com)







Polymédication chez les personnes âgées : " Que Choisir " tire la sonnette d'alarme et l'IRDES à la recherche d'un indicateur pertinent

28/01/15 - Deux études publiées le 28 janvier 2015 alertent à nouveau sur les dangers (effets indésirables, iatrogénie) de la polymédication chez les personnes âgées, définie par l'OMS comme "l'administration de nombreux médicaments de façon simultanée ou par l'administration d'un nombre excessif de médicaments".


L'UFC-" Que Choisir " publie les résultats inédits de son analyse de 347 ordonnances de personnes âgées (plus de 75 ans) polymédicamentées, au cours du deuxième trimestre 2014. "En moyenne, les ordonnances collectées dans notre échantillon contenaient 8,6 médicaments, avec un maximum de 21 pour une seule personne", relève l'enquête de l'UFC. L'association affirme que ces ordonnances ont été passées au crible de la liste de Laroche, qui définit les médicaments potentiellement inappropriés pour les patients âgés. "Les résultats sont alarmants, puisque 40 % d'entre elles contiennent un médicament déconseillé aux personnes âgées", assure " Que Choisir ". L'association presse les pouvoirs publics d'inscrire la " déprescription " pour les personnes âgées dans les indicateurs de rémunération à la performance des médecins (ROSP) et demande que la Haute Autorité de Santé fasse de ce sujet une priorité de travail. Elle estime "indispensable que les professionnels de santé prennent conscience du coût sanitaire et économique de cette situation, et commencent enfin à " déprescrire "".

Parallèlement, une étude de l'IRDES explore finement le champ de la polymédication. "Dans une société vieillissante comme la nôtre, la polymédication est un enjeu majeur de santé publique tant en termes de qualité que d'efficience des soins et de dépenses de santé. S'intéresser aux définitions (polymédication simultanée, cumulative et continue) et aux différents systèmes de mesures disponibles s'avère ainsi nécessaire, souligne clairement l'IRDES. Cinq outils de mesure, parmi les plus souvent utilisés selon la littérature, ont été testés sur la base de données Disease Analyzer d'IMS-Health sur 69 324patients et 687 médecins afin de comparer la capacité des indicateurs à repérer la polymédication et d'évaluer la faisabilité techniquede leur calcul et d'apporter une contribution à la réflexion sur les indicateurs utilisés pour l'évaluation du programme Parcours santé des aînés (Paerpa). La prévalence de la polymédication varie selon l'indicateur et le seuil utilisé. L'IRDES conclut que la revue de la littérature présentée dans son étude constitue la première étape d'une recherche sur la polymédication. Elle va se poursuivre par une analyse plus approfondie des mécanismes qui conduisent à la polymédication en examinant les caractéristiques des prescripteurs, des patients mais aussi des parcours de santé des personnes âgées.
Rappelons que le rapport de Philippe VERGER sur la politique du médicament en EHPAD (décembre 2013) soulignait la fréquence excessive de la polymédication et avançait une dizaine de mesures. Le programme expérimental " Parcours santé des aînés (Paerpa) " propose des actions d'éducation thérapeutique autour de la polymédication et de la polypathologie.
> La polymédication : définitions, mesures et enjeux. Revue de la littérature et tests de mesure - IRDES - Questions d'économie de la santé n° 204, décembre 2014
> L'enquête de l'UFC Que Choisir "Médicaments. Halte à l'overdose pour les personnes âgées !" - Résultats détaillés dans le numéro 91 de février 2015 de Que Choisir Santé



Un avis du CESE sur " la place des dispositifs médicaux dans la stratégie nationale de santé "

28/01/15 - Le Conseil économique social et environnemental a adopté pendant la séance plénière du 27 janvier 2015 un avis sur "la place des dispositifs médicaux dans la stratégie nationale de santé" présenté par ses rapporteurs Thierry Beaudet et Edouard Couty. L'année dernière les dépenses en dispositif médicaux remboursables se sont établies à 13,4 Mds €. L'Assurance maladie a pris en charge 5,8 Mds €. Le reste est à la charge des patients et de leurs complémentaires auquel vient s'ajouter le coût des DM non remboursables. Composé de 16 préconisations, ce texte insiste sur une meilleure régulation de la tarification impliquant la "révision de la procédure d'inscription sur la liste des produits et prestations remboursables (LPPR), dont les mécanismes tarifaires sont aujourd'hui très complexes", une valorisation des dispositifs médicaux les plus innovants et utiles, une réactualisation régulière de la liste en sus et des GHS, ou encore "le renforcement des procédures de sécurité" en amont et en aval pour améliorer la qualité. Il recommande également d'associer les organismes complémentaires aux démarches de tarification et de prise en charge.


En France, le marché des dispositifs médicaux est porté par 1100 entreprises qui emploient environ 65 000 personnes, indique l'avis du Conseil économique, social et environnemental. Il s'agit à 94 % de PME, dont 45 % de TPE. Avec 23 milliards d'euros de chiffre d'affaires, le marché national occupe la 4e place mondiale derrière les Etats-Unis, l'Allemagne et le Japon. Toutefois, la balance commerciale est déficitaire, car 55 % des dispositifs médicaux sont importés et seulement 20 % exportés.
> Présentation de l'avis



La Mutualité française revient à la charge sur les réseaux de soins


30/01/15 - Le président de la Mutualité Française, Etienne Caniard, était invité à échanger auprès des journalistes de l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis) sur l'actualité des mutuelles, le 30 janvier 2015. Une occasion de revenir sur les avantages des réseaux de soins mutualistes, un an après la loi Le Roux. Depuis 18 mois, la loi autorise ces réseaux mutualistes. Mais en pratique, seules les conventions dans les domaines des soins dentaires, d'optiques et d'audioprothèses sont opérationnelles. Etienne Caniard propose d'étendre les réseaux de soins à tous les professionnels de santé, de s'orienter résolument vers une véritable généralisation de la complémentaire santé non seulement pour les salariés mais aussi pour ceux qui ne sont pas dans la vie active (retraités, chômeurs de longue durée ou jeunes précaires), et de diminuer de façon conséquente la fiscalité des contrats santé pour les rendre plus accessibles financièrement (voir son interview). Quelques chiffres clés avancés par la Mutualité : 1,9 milliard d'euros. C'est l'économie dont pourraient bénéficier les Français s'ils avaient tous accès à des réseaux de soins optiques, dentaires et d'audioprothèses. La diminution moyenne du reste à charge (RAC) dans un réseau représente 140 € en dentaire, 65 € en optique, et 390 € en audioprothèse.

> Et si on parlait des réseaux de soins des mutuelles ? - la vidéo la plus populaire de la websérie #RDVsolidaire avec 551 000 vues sur YouTube (18-01-15)






TIC santé - e-administration - services publics

Premier "Hackathon" de l'Assurance Maladie. Une collaboration réussie au service de l'ouverture des données de santé

27/01/15 - L'Assurance maladie et Etalab, mission gouvernementale chargée de l'ouverture des données publiques, ont organisé, le 26 janvier, le premier marathon informatique exploitant des données regroupées au sein du système national d'information inter-régimes de l'Assurance maladie (Sniiram) préalablement anonymisées, dans les locaux de l'association La Paillasse, dans le 2e arrondissement. Le but de l'événement pour les développeurs, statisticiens et représentants issus d'instances publiques (Drees, HAS), d'organismes complémentaires, de cabinets de conseil ou de start-up invités pour l'occasion (une soixantaine de participants) était de se regrouper en équipes pour monter, en une journée, des projets établis à partir des bases de données de l'Assurance maladie mises spécialement à leur disposition. En marge de la présentation des projets, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a qualifié l'ouverture de ces données de “mouvement incontournable”, qui doit évidemment être encadré, et qui doit faire évoluer “la culture de rétention” des administrations. Le projet de loi Santé, examiné en avril au parlement, prévoit un accès facilité et protégé à un "grand système national des données de santé", et notamment son ouverture aux entreprises à but lucratif, "dès lors que l'intérêt général est l'objectif recherché", a expliqué la ministre. La vente de ces données n'est pas exclue, a-t-elle affirmé, assurant que la loi contiendrait "des garde-fous". Elle a également annoncé que l'article 47 de la loi de Santé sur la mise à disposition des données médico-administratives, parfois critiqué pour ses conditions trop restrictives, "devrait évoluer".


La CNAMTS se dit prête à ouvrir davantage les données du Sniiram, qui "constitue probablement la plus grande base de données médico-économiques dans le monde", notamment à des fins de recherche, a déclaré son nouveau directeur général, Nicolas Revel. Une partie de ces données sont déjà accessibles à quelque "250 organismes", essentiellement publics, et à une "vingtaine d'équipes de recherche par an", selon M. Revel. Le nouveau patron de la CNAMTS a annoncé que les données présentées lundi aux participants seraient mises en ligne dès le premier jour du mois de février sur data.gouv.fr, l'objectif étant d'aller plus loin par la suite, avec d'autres jeux de données comme la base médicaments qui recense les informations relatives aux produits soumis au remboursement.
"La diversité des projets explorés au cours de cette journée fournit une illustration concrète des bénéfices d'une ouverture élargie de ces données agrégées. Le croisement des données et les différents angles d'approche apportent une profondeur d'analyse indispensable pour identifier de nouveaux champs exploratoires au service d'une évaluation toujours plus fine du système. Cette expérimentation a également permis de démontrer les spécificités des données gérées par l'Assurance Maladie et les risques de ré-identification directe ou indirecte des personnes qui les caractérisent", explique le communiqué de la CNAMTS.
> Le communiqué de presse de la CNAMTS 27 janvier 2015
> Marisol Touraine : l'ouverture des données de santé, "un mouvement incontournable" - L'Express




Edition 2014 du Baromètre sur l'opinion des Français et la satisfaction des usagers sur les services publics régaliens

28/01/15 - Organisé le 27 janvier 2015 par l'Institut Paul Delouvrier, le colloque " Service public : les citoyens ont la parole " a marqué le dixième anniversaire du baromètre de l'institut destiné à mesurer l'opinion des Français et la satisfaction des usagers sur les services publics régaliens. Au cours de l'évènement, les résultats de la dernière vague du baromètre réalisée fin 2014 en partenariat avec TNS Sofres ont été dévoilés.


D'après l'étude, en moyenne 59 % des usagers considèrent qu'il serait possible de réaliser des économies importantes sans diminuer la qualité des différents services publics. C'est spécialement vrai en ce qui concerne les services fiscaux (78 %), la Sécurité sociale (76 %) ou l'emploi (65 %), le logement (55 %), la justice (53 %) et la santé publique (51 %). Seules exceptions : l'Education nationale et la police. Le baromètre confirme une tendance : celle d'une préférence croissante des Français pour la baisse des impôts, fût-ce au détriment des prestations fournies. S'ils devaient choisir, près des deux tiers des Français (65 %) privilégieraient une diminution des impôts accompagnée d'une réduction des prestations plutôt qu'une augmentation des impôts pour une amélioration des prestations. Pour baisser les dépenses publiques, la piste la plus citée par les personnes sondées est l'amélioration de l'efficacité des services publics (61 %), devant la baisse du montant de certaines aides sociales (54 %) et la réduction des " dépenses d'équipement et d'infrastructures " (41 %). Reste que, globalement, il y a une tendance qui ne se dément pas : la satisfaction des usagers est bien supérieure à l'opinion des Français sur les services publics. En 2014, les proportions d'avis favorables étaient respectivement de 67 % (niveau le plus bas depuis 10 ans) et de 39 %. Toutefois, cet écart tend à se réduire après deux années au cours desquelles il s'était creusé. La santé publique, la police et la Sécurité sociale se distinguent positivement et l'emploi négativement. Parmi les attentes chères aux Français concernant leurs relations avec les services publics, la notion d'efficacité est à nouveau largement plébiscitée.
> Baromètre décembre 2014 : rapport synthétique
> Baromètre décembre 2014 : note de synthèse



La vidéo de la semaine
  • Enquête de santé - Ces très chères mutuelles - Diffusé sur France 5 le mardi 27 janvier 2015 - vidéo 1h40 avec le débat sur Youtube
    "Ces très chères mutuelles" : c'est sous ce titre volontairement polémique que France 5 a consacré le 27 janvier son "Enquête de santé" aux complémentaires. L'émission, construite autour d'un documentaire de 52 minutes, "Complémentaires santé : inégalités assurées ?", puis d'un débat en direct, a abordé de vraies questions, en particulier celles du renoncement aux soins ou encore de la couverture santé des retraités. A lire la réaction de la Mutualité française "Complémentaires santé : pas d'amalgame" qui regrette l'absence d'un de ses représentants sur le plateau 
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  • Débat au Sénat : " La France dispose-t-elle encore du meilleur système de santé au monde ? " - 29 janvier 2015
    Interventions de Gilbert Barbier, pour le groupe RDSE, Laurence Cohen, François Fortassin, Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Milon, Patricia Schillinger, Aline Archimbaud, Catherine Deroche, Philippe Mouiller, Ségolène Neuville, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion - Voir le dossier vidéo

Rapports - études - dossiers - avis - notes
  • Rapport 2014 du Défenseur des droits
    Le nombre de saisines auprès du défenseur des droits a augmenté entre 2013 et 2014, enregistrant plus de 100 000 demandes d'intervention et de conseils (73 463 dossiers de réclamations et 39 130 appels aux plateformes téléphoniques de l'Institution), selon le premier rapport d'activité annuel du Défenseur des droits publié le 27 janvier 2015. Au cours de l'année 2014, l'institution a traité 71 624 réclamations, tant au niveau du siège qu'à travers son réseau de délégués territoriaux. Parmi les domaines d'intervention, la protection sociale et solidarité arrive en tête avec 19 % devant la défense des enfants (16 %) les affaires judiciaires (15 %) et la santé (11 %). Rapport annuel d'activité 2014
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  • Note d'information du RSI - Mise au point du régime au moment de manifestations annoncées de travailleurs indépendants
    Des manifestations de travailleurs indépendants sont annoncées dans les semaines qui viennent dans différentes villes en France, pour contester le fonctionnement du Régime social des indépendants mais également les cotisations et les prestations sociales personnelles des TI. À cette occasion, le RSI sort une note d'information de 9 pages destinée à la presse. Sont détaillés la situation et la qualité de service du régime, les cotisations sociales des travailleurs indépendants (baisses et simplifications), les prestations sociales et l'obligation d'affiliation et de cotisations.


Le hit des liens les plus cliqués de la lettre 635 du 18 janvier 2015

vendredi 13 décembre 2013

dnf - le grand projet que le monde entier nous envie, ou : plus flou tu meurs


Les gestes d'ouverture du nouvel Hôtel-Dieu
 
12 décembre 2013 | Par Caroline Coq-Chodorge - Mediapart.fr

 

Faire coexister dans un même lieu l’hôpital et la médecine de ville, la recherche et les patients : une équipe de professionnels de santé dessine ce que pourraient être les nouveaux contours de l'Hôtel-Dieu. Depuis qu'il a pris la tête de l'AP-HP, Martin Hirsch démine le dossier et auditionne. Discrètement et sans argent.

Des urgences ou pas, un hôpital ouvert ou fermé, un avenir ou une mascarade ? Le brouillard flotte toujours autour de l’Hôtel-Dieu. Ce qui devrait nourrir un débat sur l’accès aux soins à Paris est en réalité un dialogue de sourds, un feuilleton aux rebondissements difficiles à suivre, dans le contexte des élections municipales. Résultats : les urgences ont fermé le 4 novembre, sans surprise, une consultation ouverte 24 heures sur 24 a pris le relais, en catimini, et quelques personnes travaillent, au secret, à une préfiguration d’un nouvel Hôtel-Dieu.

C’est de cette situation confuse que vient d’hériter le nouveau directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Martin Hirsch. Avant lui, Mireille Faugère a payé ses relations difficiles avec la majorité socialiste à la mairie de Paris, qui soutient le projet du nouvel Hôtel-Dieu, mais ne veut pas froisser ses alliés écologistes et communistes, mobilisés contre la fermeture des urgences. Dès sa nomination, le 13 novembre, Martin Hirsch a largement consulté avant de se positionner le 5 décembre. Il abandonne « les arrière-pensées immobilières » du plan de Mireille Faugère : la vente du siège de l’AP-HP – un joli pâté de maisons en bord de Seine au centre de Paris – et son déménagement à l’Hôtel-Dieu. Martin Hirsch a fait une autre concession, de façade, aux défenseurs du service des urgences : le « service porte » est rouvert. C’est une salle où les patients sont placés en observation ou en attente d’une hospitalisation. Elle servira peu, car il n’y a plus d’hospitalisation possible à l’Hôtel-Dieu. Martin Hirsch a en effet confirmé la poursuite du transfert des derniers services d’hospitalisation dans d’autres hôpitaux parisiens : médecine interne, oncologie, diabétologie, etc. L’Hôtel-Dieu est désormais presque vide.

Jean-Christophe Allo, urgentiste, en charge de la nouvelle consultation ouverte 24 heures sur 24 à l’Hôtel-Dieu. © DR

 

Restent des centres de consultations – pour les jeunes, les populations précaires – et à la place des urgences, une « consultation 24 heures sur 24 ». La différence, de taille, c'est que les patients se présentent par leurs propres moyens. Les pompiers, les ambulances et le Samu n’amènent plus d’urgences graves. L’anesthésiste-réanimateur Jean-Yves Fagon fait la visite. Il est le responsable médical du nouvel Hôtel-Dieu. C’est un des professeurs qui compte à l’AP-HP. Nous avions visité les urgences en juillet, le service était calme, il l’est encore un peu plus aujourd’hui. Jean-Yves Fagon estime à « une soixantaine » le nombre de passages par jour, contre une centaine auparavant. C’est peu, mais il s’en satisfait pour l’instant, car cette consultation a été mise en place dans un contexte très polémique. « Nous avons décidé de ne pas communiquer », explique-t-il. Cela sera bientôt fait, Martin Hirsch l’a annoncé.

S'il n’y a plus de possibilité d’hospitalisation à l’Hôtel-Dieu, il reste un plateau technique important : radiologie, laboratoire d’analyse, scanner, IRM, échographie, etc. Pour répondre à quel niveau d’urgence ? Comment s’articule-t-il avec les urgences hospitalières et la médecine de ville ? Pour l’urgentiste Gérald Kierzek, défenseur de l’ancien Hôtel-Dieu, « c’est de la com, des demi-urgences, c’est dangereux. Cette consultation est vide quand les autres services d’urgence saturent ». Autre approche, tout aussi critique, du syndicat de médecins généralistes libéraux MG Paris : « L’accès dérégulé aux urgences, c’est plus de fric pour l’hôpital, qui ne fait jamais la promotion de nos maisons médicales de garde, s’énerve sa présidente Agnès Giannotti. Cette consultation 24 heures sur 24, c’est une désorganisation supplémentaire. »

La fréquentation des urgences progresse de 5 % par an en moyenne. À côté de réels cas graves, se présentent aussi ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas avancer le prix de la consultation chez les médecins libéraux, ceux qui n’ont pas de médecin traitant ou s’orientent mal dans le système de soins. Et cela ne peut pas s’arranger car, côté médecine de ville, la situation se tend aussi. Paris est pourtant richement doté en médecins. Les généralistes, qui pour la plupart ne pratiquent pas de dépassements d’honoraires, sont encore nombreux. Mais l’Ordre des médecins prévoit une diminution de 30 % de leur nombre d’ici 2018.

L'expertise des malades

La faute à la situation financière fragile des centres de santé – nombre d'entre eux ont fermé ces dernières années – et au coût de l’immobilier qui freine l’installation des jeunes. Quant aux médecins spécialistes, leur nombre progresse, mais le prix de leur consultation aussi. Que choisir a réalisé l’an dernier une cartographie de la France sans dépassements d’honoraires : pour l’accès aux spécialistes, Paris est un désert médical.

 

La carte de la fracture sanitaire du magazine « Que choisir ».

Pour accéder à la carte, cliquer ici

Pour le repeupler, l’Hôtel-Dieu ambitionne de devenir un « centre de soins », offrant des consultations de médecine générale et spécialisée, sans dépassements d’honoraires ni avances de frais. Le projet est encore très ouvert : « Nous voulons construire une gouvernance partagée, avec les hospitaliers, les médecins de ville, les universitaires et les usagers », assure Jean-Yves Fagon.

 
 


Thomas Cartier, chargé de mission sur la médecine générale pour le nouvel Hôtel-Dieu © CCC

Thomas Cartier, jeune médecin généraliste récemment débauché du gros centre de santé de Gennevilliers, est chargé de piloter le volet médecine générale. Il fait le tour des centres de santé et des médecins de ville, pour tenter de les rallier : « C’est la première fois que l’AP-HP s’ouvre ainsi sur la ville, c’est une révolution culturelle. Mais les résistances sont fortes. »

Richard Lopez, président de la Fédération nationale des centres de santé, trouve « l’approche intéressante », en particulier la réflexion sur une nouvelle offre de consultations spécialisées : « Aujourd’hui, c’est une galère pour nos patients, la pratique des dépassements d’honoraires est déraisonnable. » Alain Beaupin, membre de l’Union syndicale des médecins de centre de santé et du comité de défense de l’Hôtel-Dieu, qui demande depuis des mois à l’AP-HP d’abandonner son projet de nouvel Hôtel-Dieu, le reconsidère aujourd’hui : « Fagon et Lombrail sont prêts à discuter. L’Hôtel-Dieu est une page blanche sur laquelle il est désormais possible de construire quelque chose de vraiment nouveau. Il ne faut pas manquer cette occasion. » Agnès Giannotti, présidente de MG Paris, syndicat qui promeut depuis des années de nouvelles formes d’exercice de la médecine générale, est de son côté très remontée : « De la médecine générale d’excellence à l’hôpital ? On rêve ! C’est dans nos cabinets qu’elle se fait. L’Hôtel-Dieu est en train de saper tous nos efforts. » Elle n’est pour autant pas totalement fermée au dialogue : « Si on construit ce projet, on le construit ensemble. On a besoin de l’hôpital, d’un accès à des consultations spécialisées. »

L’Hôtel-Dieu a une autre ambition encore : devenir un « hôpital universitaire de santé publique », en lien avec toutes les facultés de médecine d’Île-de-France. Il servirait de terrain de recherche et de stage pour les internes en médecine générale. Ce projet viendrait conforter une lente réhabilitation de cette discipline dans un pays qui a le système de santé le plus inégalitaire d’Europe : plus de six ans de différence d’espérance de vie entre un ouvrier et un cadre. Ces inégalités s’expliquent par la faiblesse des « soins primaires», en France, c’est-à-dire du premier niveau de contact de la population avec le système de santé.

 

Thomas Sannié, représentant des usagers à l’AP-HP et membre de l’équipe de préfiguration du nouvel Hôtel-Dieu © CCC

Un autre volet « expérimental » du projet du nouvel Hôtel-Dieu est porté par des représentants des usagers, intégrés à l’équipe de préfiguration, en premier lieu Thomas Sannié, le président de l’Association française des hémophiles, et représentant des usagers à l’AP-HP. « Avant, on mourait ou on guérissait d’une maladie, explique-t-il. C’est terminé. En Île-de-France, 15 personnes sur 100 ont une maladie chronique. Ils vivent avec leur pathologie, ils travaillent, ils aiment. » Il veut former à l’Hôtel-Dieu des « patients experts », qui pourront transmettre leurs connaissances de leur maladie à d’autres patients et aux professionnels. Aides, l’association de malades du sida, est également partie prenante : elle veut participer à la construction d’une « offre de soin potentiellement innovante pour les séropositifs ». « On ne manque pas d’hôpitaux en France, on a besoin d’une autre approche du soin », poursuit Thomas Sannié.

À l’intérieur de l’AP-HP, en déficit de 70 millions d’euros en 2013, c’est le coût de ce projet qui inquiète. En renonçant à la vente du siège, estimé à 150 millions d’euros, il s’est privé d’une garantie financière. Le 10 décembre, Martin Hirsch a expliqué ses choix pour l’Hôtel-Dieu à la commission médicale d’établissement, qui représente les médecins de l’AP-HP. Son président Loïc Capron raconte : « Martin Hirsch nous a expliqué qu’il trouverait d’autres sources de revenus, ce qui nous a fait un peu sourire. Pour l’instant, il n’y a pas de budget pour le nouvel Hôtel-Dieu. »  « Personnellement », Loïc Capron est « favorable » à ce projet : « C’est l’occasion de développer un prototype de coopération ville-hôpital. Je serais très heureux de voir enfin ces deux médecines travailler ensemble. »